En tant que praticienne en hypnose conversationnelle stratégique-PTR, je suis régulièrement amenée à accompagner des victimes de manipulateur-trice pervers-e narcissique (MPN).
Afin d’aider au mieux ces personnes, j’ai, dans un premier temps, beaucoup lu sur la personnalité des MPN. Je voulais décortiquer leur fonctionnement pour mieux l’expliquer à mes client-e-s et leur permettre ainsi d’avoir une meilleure connaissance consciente du piège dans lequel ils ou elles se trouvaient. Ces éclaircissements étant, pour moi, un préambule nécessaire au travail inconscient de « désenvoûtement » que nous mènerions par après ensemble grâce à l’hypnose. Ensuite il m’a paru tout aussi essentiel de dessiner le portait de l’empathe, victime toute désignée.
Enrichies de mes lectures et de ma pratique, ces explications ont, petit à petit, pris une forme assez précise que j’ai essayé de rendre la plus pédagogique et la plus claire possible. Ces explications, volontairement généralistes, sont bien entendu à nuancer en fonction de l’histoire du ou de la cliente, chaque personne et chaque relation « toxique » étant unique.
Portrait du MPN
Robot vide d’émotions, « être » égotique qui n’est rien d’autre que sa forme extérieure démunie « d’âme », le ou la MPN, est aussi caméléon et vampire dans la prédation.
Robot d’abord : inutile d’essayer de se mettre à sa place pour le comprendre. Il n’y a rien à comprendre ! Aussi perturbant que cela puisse-être le MPN est un robot doté d’un programme qui tourne autour d’un axe principal : il n’aime personne sauf lui-même. Vraiment personne, c’est-à-dire ni la personne qui partage sa vie, ni ses « amis », ni sa famille, ni ses propres enfants. Par contre c’est un très bon comédien : ce robot peut calquer son comportement sur celui des autres pour faire croire qu’il est amoureux, maternel ou paternel, gentil, attentionné, à l’écoute et même empathique. C’est son côté caméléon.
Portrait de l’empathe
C’est un empathique (Haut-Potentiel, Zèbre et autre hypersensible…), une personne généreuse, spontanée, sensible, créative, sincère qui voit le monde et les autres au travers d’un prisme bienveillant et se sent parfois seule, incomprise, en décalage. Elle se soucie des autres souvent plus que d’elle-même, veille à leur bien-être, est à l’écoute et se remet constamment en question (elle est tout ce que le MPN n’est pas).
Conscient qu’il n’est pas parfait, souvent peut sûr de lui, l’empathe peut douter et culpabiliser très (trop) facilement.
Parce qu’ils sont les exacts opposés, il n’est pas difficile d’imaginer qu’empathe et MPN vont s’aimanter l’un l’autre à défaut de s’aimer.
La phase de séduction
Quelle que soit la relation (amoureuse, amicale, professionnelle) il y a toujours une phase de séduction dans laquelle le MPN développe à merveille son masque d’acteur-caméléon et ferre sa proie. Grâce à son « radar infaillible » le MPN va repérer les besoins (et donc, selon lui, les failles) de l’empathe pour composer et sur-jouer, l’amoureu-se, le ou la collègue, le ou la responsable idéal-e-s.
Et c’est le premier piège dans lequel va tomber la personne empathique. Vivant au travers de ses émotions et de celles des autres, l’empathe ne peut se résoudre à l’idée que le MPN soit manipulateur. Il va donc se laisser emporter sans la moindre méfiance par ce robot-caméléon avec lequel il aura l’impression d’entrer totalement en résonance. L’empathe va alors révéler tout de lui, se confier sans retenue, n’imaginant pas un seul instant que le MPN enregistre tout dans sa mémoire phénoménale et ,qu’au final, absolument tout ce qu’il aura confié sera retenu et utilisé contre lui.
Mais c’est déjà trop tard :
- l’empathe est accro au MPN qu’il perçoit comme son double (avec toutes ses qualités généreuses et empathiques).
- le MPN est accro à l’empathe dont il a besoin comme d’un miroir qu’il lui renvoie une belle image de lui-même et flatte ainsi son égo surpuissant.
A noter que cette phase de séduction et la phase de destruction qui suivra inévitablement est d’autant plus facile pour le MPN si l’empathe a déjà été manipulé, dans son enfance par un parent, dans une première relation amoureuse, amicale ou de travail. Le MPN flairera rapidement l’impuissance acquise de sa future proie et s’engouffrera dans le sillon déjà tracé par d’autres.
La phase de destruction
Après les quelques mois de « lune de miel » idylliques, le robot laisse tomber, pour des périodes de plus en plus longues, le masque du caméléon-comédien, et montre son vrai visage : dur, froid, sans émotion, laissant alors souvent rugir la violence des mots et/ou des gestes. Face à l’empathe déboussolé par ce changement qu’il ne peut expliquer, le MPN va appuyer sur les failles de sa proie et lui faire comprendre que c’est de sa faute à elle si lui , MPN, n’est plus comme avant. » Si tu veux que je redevienne comme avant il faut que tu fasses ce que je te demande » ordonnera le MPN! Et plus l’empathe cherchera à le contenter, moins le MPN sera satisfait. Le piège de la double contrainte.
Parce que l’empathe se remet tout le temps en question et culpabilise facilement, commence alors la descente aux enfers.
Le MPN va manipuler l’empathe (en tirant sur toutes les ficelles, c’est-à-dire les confidences qu’il a enregistrées patiemment durant la période de séduction) pour qu’il comble ses seuls besoins narcissiques. Tout cela se fait insidieusement, par à- coups, alternance de caresses et de coups.
Je ne vais pas m’attarder ici sur les techniques de manipulations couramment employées par les MPN et décrites dans de nombreux ouvrages et sur de nombreux sites internet. Elles ont toutes pour effets de faire douter l’empathe sur sa propre santé mentale et de lui ôter tout estime de lui-même, parfois jusqu’à la mort. C’est que, dans cette phase-là, le robot enfile le masque du vampire. Il se nourrit de la « lumière » de l’autre jusqu’à l’éteindre tout en lui injectant un poison puissant. Ce poison agit comme une drogue et rend la victime totalement dépendante.
Au bout du compte, lorsque son « jouet » n’est plus qu’une loque incapable de lui renvoyer la belle image dont il a besoin, le MPN le laisse tomber sans ménagement et se trouve une autre proie. Mais attention, c’est lui qui décide. Si l’empathe prend conscience de la manipulation dont il est victime et veut partir, le MPN fera tout pour maintenir l’emprise utilisant, s’il le faut, les enfants, les amis, la famille comme bras armés.
L’histoire d’une relation construite sur des fondations communes
Au-delà du portait de l’un et de l’autre, au-delà des phases de séduction et de destruction, c’est bien la relation entre ces deux types de personnes qui est au centre de la problématique et du jeu psychologique qui en découle. L’un activant l’autre et vice versa.
Qu’est-ce qui fait, outre que le MPN repère chez l’empathe ses failles, que ces deux – là sont attirés l’un vers l’autre ?
On pourrait évoquer le triangle dramatique de Karpman où, tour à tour les acteurs sont à la fois persécuteur, sauveur et victime. Mais il me semble que c’est plus (ou moins) complexe dans la relation MPN-Empathe. Si les deux peuvent être victimes, dans la relation même, l’empathe sera rarement persécuteur et le MPN rarement sauveur (de l’autre en tout cas, mais agira par contre bien en « sauveur de lui-même »).
Le lien tient peut-être à une base commune : MPN et empathes ont besoin de l’autre, les uns pour renforcer leur narcissisme et jouir de détruire, les autres pour renforcer leur confiance en eux et jouir d’aider et de soutenir.
Ainsi dans un endroit public, MPN et empathe vont avoir naturellement le regard attiré par les personnes dégageant tristesse ou désarroi . Et justement : l’empathe se fait souvent aborder par le MPN lorsqu’il est en période de trouble (fin d’une relation, deuil, passage de vie difficile…), tandis que le MPN-caméléon joue très bien la victime seule et abandonnée.
Ce besoin de l’autre pour des raisons différentes, cette dépendance à l’autre, est le ciment de ce lien toxique, le socle sur lequel tous deux vont construire la relation avec la manipulation comme outil : perverse, destructrice et violente comme moyen de domination du côté du MPN, aimante, bienveillante et sincère comme moyen d’épanouissement et d’estime de soi du côté de l’empathe.
Lors des séances d’hypnose conversationnelle stratégique, il nous faudra donc aborder plusieurs strates : désensibiliser les premières manipulations (remonter à la source de l’impuissance acquise), dépasser la peur, soigner la dépendance, renforcer l’estime de soi, se désintoxiquer de l’autre et puis, enfin et surtout, se reconstruire, devenir complet, entier, bien avec soi-même afin de ne plus donner à l’autre un pouvoir de vie ou de mort.
Bérangère Lhomme- Hypnose conversationnelle stratégique
En savoir plus sur la Formation complémentaire à la PTR : Pervers narcissiques